mardi 7 février 2012

II/ Un modèle culturel qui se modernise



II/Un modèle culturel qui se modernise


A/Mutations structurelles et culturelles

1) Assouplissement de l'emprise de la famille
    Les indiens utilisent des termes comme « maisonnée » ou « parenté » pour désigner la famille car ils ressentent un besoin d’appartenance, ce besoin s’exprimant aussi au sein du système des castes. Ces familles sont très unies, ce sont des familles « indivises », c’est-à-dire des familles qui respectent la tradition, « l’Ordre du monde », le système des castes.

a) La structure de la "maisonnée"
    La famille indienne de base est une famille patriarcale. Elle se regroupe autours du père, chef de famille, vient ensuite ses fils et la mère. Les filles occupent un rôle plus secondaire, elles demeurent au foyer jusqu’au mariage restant sous la tutelle de leur parents jusqu’à ce que leurs maris prennent le relais. La maisonnée est souvent l’habitat de membre de la famille éloigné, comme les cousins, les neveux, la tante.
    Cet éloignement est visible par le vocabulaire et le comportement qu’utilisent les personnes entre eux, plus intime et direct avec une personne proche, et plus impersonnel avec une personne plus détaché. Cependant, il y a une obligation d’entraide au sein d’une même ligné, par contre il n’y a pas de notion d’appartenance des biens matériels. Tout ce que possède un agent est mis à la disposition de tous. La famille conjugale qui correspondrait à l’occident n’est pas très répandue en Inde, elle tend à se développer pour des raisons comme la mobilité des emplois qui poussent les couples à déménager et donc à quitter la maisonnée. Ces pratiques ne sont en aucun cas une rupture avec le modèle indien mais sont plus une antenne extérieure à la famille indivise.

b) Le rôle de la femme
     La femme est perçus comme le lien invisible qui lie chaque les membres de la famille entre eux. La situation de la femme indienne est changeante. Lorsqu’elle est enfant, elle est moins appréciée que ces frères. Mariée, elle est soumise aux volontés de son époux, et de sa belle-mère qui dirige la maison. C’est seulement quand la femme aura donné un fils à la ligné de son mari qu’elle sera reconnue. De plus, elle deviendra maîtresse de maison, et possédera une grande emprise sur la vie familiale, dès que ses enfants auront une femme. Aucune décision ne pourra alors se prendre sans elle. Elle reste pourtant en retrait et laisse souvent son mari les prendre pour elle. Il se peut parfois qu’elle use de cette position pour intervenir dans les décisions. Elle s’occupe des jeunes enfants jusqu’à l’âge de 7 ans en leur enseignant les traditions. Elle reste très proche d’eux tout le reste de leurs vies.


2) Assouplissement des matrices religieuses

a) Point global

    L'Inde est un pays profondément marqué par la religion dans la mesure où elle concentre cinq des principales religions du monde: l'hindouisme, l'islam, le bouddhisme, le jaïnisme et le sikhisme. De tous temps et encore de nos jours la religion est partie intégrante de la culture et tient un rôle, de premier plan, dans le jeu politique. La diversité et la tolérance religieuses sont des traits significatifs de la culture indienne reconnus par la loi. La majorité des Indiens sont intégrés dans une religion et celle-ci joue souvent un rôle primordial dans leur vie.

Aujourd'hui l'hindouisme demeure la religion la plus pratiquée avec près de 827 millions de fidèles. Les religions musulmanes et chrétienne ainsi que d'autres minorités suivent ensuite.
La religion joue un rôle majeur dans le mode de vie indien puisque celui-ci s'articule quotidiennement autour de rites, de prières mais aussi de pratiques sociales et religieuses. Ainsi on peut affirmer qu'il existe en Inde une matrice religieuse qui régit des valeurs et des normes et domine les individus dans leur choix de vie. Cette approche holiste est largement reconnue et acceptée par les indiens dans la mesure ou la pratique religieuse est en Inde une institution.

b) Une mutation

    Aujourd’hui, le sous-continent indien connait une croissance économique rapide qui semble quelque peu modifier un modèle culturel millénaire fondé sur la prééminence de la matrice religieuse. Historiquement la Constitution fait de l'Inde une république laïque, interdisant la discrimination basée sur la religion et consacrant la liberté de conscience. Cependant le droit civil indien reconnait l'application du droit hindou et de la charia pour les citoyens hindous ou musulmans.

    Ainsi l'inde religieuse connait de profondes mutations aujourd'hui dans la mesure ou semble se développer un assouplissement de ses pratiques. Si l'athéisme fait en Inde figure d'exception les diverses religions se caractérisent en elles même par des divergences internes.
La religion majoritaire se caractérise par une hiérarchisation de ses fidèles en fonction de leur hérédité qui détermine leurs fonctions dans la société et leur degré de pureté. Ce système plus connu sous le nom de castes semble aujourd'hui entrer en voie de rémission puisqu'il est en partie interdit par la Constitution.
Cependant ce modèle social ne disparait totalement mais évolue plutôt vers de nouvelles modalités dont la mobilité sociale jusque-là interdite. Ainsi de nombreux intouchables occupent aujourd'hui de hautes fonctions.
Ainsi on peut dire que la croissance économique indienne influe sur sa culture. En effet, la religion connait des mutations, notamment dans certains de ces fondements ou structures.

3) La classe moyenne et la société de consommation

a) La classe moyenne

    L’Inde est aujourd’hui en pleine expansion économique ce qui a réduit son taux de pauvreté en cinq ans, mais il y a encore plus de 240 millions de personnes qui vivent avec moins d’un dollar par jour.
    Durant ces dernières années, l’Inde a connu l’émergence d’une nouvelle classe moyenne qui compte 250 millions de membres. Cette notion de classe moyenne est compliqué à définir car elle dépend des propriétés que l’on possède (magasin, maison, voiture…) et du pouvoir d’achat de l’individu.
Cette classe moyenne devrait compter 580 millions d’indien en 2025 (d’après le gouvernement indien).

    Aujourd’hui, cette nouvelle classe est essentiellement composée d’hindi (jeunes hommes et jeunes femmes âgés de 20 à25 ans et qui sont financièrement indépendants).
Les personnes appartenant à cette classe sont ancrés dans une société de consommation (ils s’inspirent des occidentaux en achetant des jeans , du parfum , des chaussures et des vêtements occidentaux…).Cette apparition de nouveaux consommateurs s’accompagne de plusieurs révolutions dans divers secteurs comme l’électroménager , l’automobile ou encore les technologies de l’information et de la communication.
L’émergence de cette classe moyenne permet de favoriser la croissance économique indienne .

b) La société de consommation

    Contrairement à la France (qui connut la société de consommation après la seconde guerre mondiale), l’Inde est entrée dans cette société de consommation (société dans laquelle les individus sont poussés à consommer de façon abondante) qu’à partir des années 2000. Malgré son haut rendement économique, l’Inde possède encore une majorité de personnes pauvres (habitant vivant avec moins de 1 dollar par jour). La société de consommation est comprend des paysans vivant dans des régions où la révolution verte a porté ces fruits, de cadres, de patrons d’entreprises familiales, de dirigeants de grandes sociétés, de fonctionnaires, de salariés protégé par les unions et de commerçants (toutes ces personnes constituent la classe moyenne). Les membres appartenant à cette société creusent de plus en plus l’écart avec la majorité qui est dominée par la pauvreté. Ces années 2000 marquent le bon en avant de l’industrie et des biens de consommations : la production annuelle des réfrigérateurs augmente de façon flagrante, celle des deux roues par 10, celle des téléviseurs par 40 (atteignant 4 millions en 2000 contre 2 millions en 1985) et, de plus, l’amélioration du confort passe entièrement par l’acquisition de biens de consommations.
    Cette société de consommation risque de changer le visage économique indien car la consommation demande une forte libéralisation. Cette classe moyenne possède une forte homogénéité due à des valeurs communes et avec le succès de la société de consommation, les personnes constituant la classe moyenne ne partage plus les idées des grands capitalistes (qui constitue le parti du congrès).
    L’Inde est un pays qui possède qui possède une tradition très forte, mais cette tradition est de moins en moins pesante à l’image de l’assouplissement de la famille ou de la religion. Cet assouplissement est d’ailleurs renforcé par l’émergence d’une nouvelle classe sociale et par l’entrée du pays dans la société de consommation. Cette mutation se voit notamment dans le cinéma.


B/Le cinéma, reflet d'une société en mutation

Le cinéma Indien, communément appelé "Bollywood", désigne la réunion de plusieurs entités cinématographiques, présentes sur tout le sous-continent Indien. Le mot "Bollywood" est donc un mot valise. Cette appellation comprend Bollywood (films en langues Hindi et ourdou, réalisés à Mumbai), Kollywood (films en langue tamoul, réalisés à Chennai), Tollywood (films en langues télougou et en bengali, réalisés Andhra Padresh, et au bengale occidental), Malluwood (en langue malayalam, réalisés en Kerala) ou encore Sandalwood (films en langue kannada, réalisés au Karnataka).Le cinéma est en inde le loisir le plus répandu et accède au statut d'industrie. Bollywood illustre une société en mutation. Entre tradition et modernité, le cinéma Indien tente de trouver sa place, dans un Inde qui se recherche...


1) Des cinémas indiens stéréotypé et attaché à leurs traditions

a) Point historique


Le cinéma fait son apparition en Inde en 1898, grâce à la projection de plusieurs courts métrages des frères Lumières. En 1912, Dadasaheb Phalke, considéré comme le père du cinéma indien, tourne le premier film de fiction, Raja Harishchandra, un épisode du Mahābhārata (épopée hindoue) présenté à la presse et à quelques invités le 21 avril 1913. Le film, connaît un énorme succès dans les villages où il est projeté.

    Vers 1920, la production de film en Inde est faible et tourne autour d'une trentaine de films par an puis elle s'accélère dans les années 1930, pour dépasser les 200 films annuels. Alam Ara, film hindi sorti en 1931 et comprenant sept chansons, est le modèle de ce que deviendra la majeure partie de la production indienne.
    Après la Deuxième Guerre mondiale, le cinéma Indien recoit des récompenses internationales comme un oscar grâce à "Pather Panchal" de Satyajit Ray en 1955: C'est l'âge d'or du cinéma Indien. Cependant, le monde reste assez fermé à ce septième art qui demeure mystérieux et incompris. Ce n'est qu'au nouveau millénaire que Bollywood va se voire ouvrire les portes du marché mondial avec des succès comme "La famille indienne", "Lagaan" et "Devdas". Ainsi par exemple, Eros, distributeur dans le sous-continent, est introduit à la Bourse de Londres en 2006.


b) Familles, religion et mythes


   Le cinéma indien et plus précisément les cinémas indiens, développent pendant plusieurs décennies des films aux thématiques immuables et aux caractéristiques définies par leur origine géographique.


Ainsi le cinéma indien propose des masala : films irrationnels mettant en scène des intrigues manichéennes ou un héros extraordinaire (qui tend au demi dieu) affronte son pendant "maléfique" et secoure l'héroïne (qui joue un rôle mineur) dans un monde pourtant rationnel. On notera aussi qu'il existe dans ce cinéma une part très importante accordée aux dieux et à leur omniprésence dans le monde actuel.



Dans le même ordre d'idée se développent d'autres types de films (notamment hindi) aux intrigues mélodramatiques mettant en scène des tragédies religieuses ou familiales et qui illustrent une Inde ancestrale et attachée a ses valeurs traditionnelles. Plus précisément ce type de cinéma défend l'honneur familial, le respect des anciens ou encore le mariage arrangé considéré comme l'acte social traditionnel intériorisé par tous. Le public, se retrouve facilement dans les personnages principaux, luttant contre la fatalité et contre leur destin.

    Plus généralement tous les cinémas indiens se caractérisent par la présence des chansons traditionnelles et des danses et qui varient du baratanatyam au dapann kuttu (danse paysanne caractérisé par un rythme effréné et violent).

    Ainsi on comprend que le cinéma indien traditionnel illustre une société stéréotypée et profondément attachée à ses coutumes notamment en matière de religion ou encore de famille. Dans une Inde peu développée ce cinéma apparait donc comme une juste représentation de la réalité quotidienne des indiens marquée par les traditions sociales ou encore religieuses.

    Les cinémas Indiens ont toujours été le fruit de contestations du droit d'auteur, et de la propriété intellectuelle, s'appropriant des scénarios du vieux continent comme du nouveau, l'adoptant à la culture de certaines régions. Cette méthode n'est pas nouvelle, elle a été initiée, la première fois en 1896, par le film Train entrant en gare de Bombay, copie d'un film des frères Lumière (l'Arrivée d'un train à La Ciotat). On appel ce genre de film Hollywood masala, les «films hollywoodiens à la sauce indienne». Ce mouvement est maintenant en voie de rémission, mais il persiste à moindre mesure encore aujourd'hui. De même, la diffusion des longs-métrages est difficile, même si le sous-continent compte douze mille cinémas et plus de soixante mille vidéoclubs. Toutes les populations ne sont pas touchées par le cinéma, comme les habitants des régions en périphériques des villes. Ainsi les producteurs ne visent que les Indiens, habitant dans les villes, ayant un revenu moyen voire bas. Le cinéma Indien est ainsi une culture de masse, et non élitiste. La vente de films avant leur sorti au cinéma est très fréquente, la corruption des agents de production et le vol de film monnaie courante. Il s'organise donc en dehors des cinémas traditionnels, des projections clandestines, qui intéressent les gens à faible revenu, ou envieux de faire des économies.

2) L’heure du changement

a) Influences

    Les cinémas étrangers, au budget pharamineux, notamment européens et Américains, ont une grande influence sur le cinéma indien, et représentent 10% des films projetés en Inde. Plus particulièrement ces blockbusters modernes représentent une source d'inspiration infinie pour de jeunes réalisateurs avides de faire saliver une nouvelle classe moyenne consommatrice et éprise de l'étranger. Repris dans des films low cost les intrigues étrangères sont remaniées à l'indienne mais conserve tout de même des éléments qui ouvrent la porte a la modernité du cinéma indien. Ainsi on voit apparaitre des James Bond indien ou encore des Irobot indien dans Endhiran le plus grand succès du cinéma indien qui mêle des effets spéciaux spectaculaire (pour le spectateur indien !) et un scénario qui tend au plagiat.

Bande annonce du film. http://www.youtube.com/watch?v=Qwd2fiql9OQ

    En parallèle de ce cinéma indo occidental émerge un cinéma tourné vers des intrigues plus complexes et qui dénonce les travers d'une société enlisée dans des valeurs dépassées par le temps. Ce cinéma par ce qu'il illustre démontre la nécessité du changement et défend l'idéal d'une Inde enfin moderne et épousant les valeurs occidentales. L'exemple le plus marquant est et demeure le scenario mettent en scène deux jeunes amants dans une ville moderne (symbole de la nouveauté) pourchassés par leurs familles qui refuse leur alliance soit pour cause religieuse, avec le problème des castes , soit parce que la jeune fille est déjà promise a son cousin. Ce genre de film entend proposer une réflexion sur l'ancien et le nouveau et critiquer certaines traditions.

    Plus ironiquement on note également l'avènement d'un cinéma comique indien qui tend parfois à la parodie. Ainsi Tamil padam (un film tamoul) narre avec humour et autodérision l'incohérence et la stupidité de certains éléments présents dans le traditionnel masala.....














Cette chanson est en soi une imitation parodique de traditionnelles chansons des films masala.

    Le cinéma illustre donc une société qui mute, en raison de son progrès, et qui évolue très progressivement vers des modèles sociaux occidentaux. Cependant le cinéma indien peut aussi apparaitre comme une dénonciation du progrès, dans la mesure ou plusieurs films dénoncent, implacablement, la pauvreté ou encore la misère sociale qui sont directement issus des déséquilibres de la croissance économique (espaces ruraux isolés, ravages sociaux, ....)


b) Le cinéma d'auteur

    Certains réalisateurs indiens entendent échapper au diktat du nouveau cinéma à grand public. N'abandonnant pas pour autant la quête de profits ils développent des thématiques plus complexes ou initient de nouvelles techniques et de nouveaux genres cinématographiques. Ainsi l'avènement de comédies musicales indiennes est une réalité. Avec pour exemple les films de Raj Kapoor comme Shree 420 (1955) qui sont considérés comme exceptionnels. On chante et on danse aussi chez Guru Dutt mais il atteint dans le mélodrame même une sorte de perfection. (L'assoiffé 1957).

    Certains films sont également liés à une vocation politique ou sociale : Bombay film de mani ratman est inspiré des violentes émeutes intercommunautaires entre musulmans et hindous a Bombay durant l'hiver 1992-1993.
Dans le même ordre d'idée Daravi 1991 Sudir Mishra narre une histoire violente et tragique ponctuées de séquences chantées et dansées dans les bidonvilles de Bombay. Un autre exemple de cinéma d'auteur est C'est loin la mer? 1994 de Jahnu barua qui peint l'existence d'un vieux batelier qui veut à tout prix que son petit-fils fasse des études. Cependant ces tentatives restent minoritaires dans la mesure où le public demande surtout un bon moment de plaisir et de détente pour oublier ses soucis ...

    Pour conclure, on peut donc dire que le cinéma indien reflète une société en pleine mutation entre modernité et repli sur ses traditions....

1 commentaire: